Les bibliothèques et musées, lieux de savoirs (Jacob, 2007) font se côtoyer des dispositifs (Jacquinot-Delaunay, Monnoyer, 1999) d’organisation, d’architecture, voire de mise en scène, susceptibles de susciter une appropriation progressive de l’espace par les usagers. La manière de présenter les objets et la diversité des dispositifs révèle l’importance que l’on accorde à l’agencement de l’espace au sein des lieux de savoirs que sont les bibliothèques et les musées afin de les rendre propices à l’accès au savoir (Fabre, Regimbeau, 2013). Plus largement, les espaces de culture et de loisirs ont revu leur agencement en misant sur une large palette d’usages et une pluralité de pratiques en situation. Ces mêmes organisations laissent ainsi place à de nouveaux services dédiés à de nouvelles expériences sensibles des publics[1].
Depuis le début des années 2000, le paysage documentaire public s’est peu à peu agrandi de figures telles que Troisième lieu pour les bibliothèques publiques, et le learning centre pour les bibliothèques universitaires, les fablabs notamment dans les espaces de culture scientifique et technique. Ces figures semblent questionner et impacter les espaces documentaires scolaires, Centre de documentation et d’information de l’Education nationale et de l’Enseignement agricole parfois dénommés 3C pour Centres de culture et de connaissance, en particulier dans la manière dont ces nouveaux espaces réinterrogent l’accès aux savoirs. Or, à l’abri des débats entre sphère professionnelle et médiatique autour des bibliothèques, comme en témoigne l’article critique paru dans le Monde diplomatique de juin 2018[2] qui présente ces institutions comme des espaces dont les aspects conviviaux et utilitaires, éclipseraient leur organisation scientifique du savoir, des chercheurs poursuivent l’observation des pratiques dans ces lieux de savoirs. Au-delà, les notions même d’apprentissage et de construction de savoirs, ne se résument plus aux seules expériences de lecture de documents, mais à des démarches expérientielles en situation (gamification, fabrication, testing…).
Résumé : Dans cet article nous faisons l’hypothèse que la technologie de la blockchain surtout connue aujourd’hui comme fondement nodal du Bitcoin et d’autres monnaies numériques comme l’Ethereum est déjà une technologie ouverte à d’autres applications notamment en lien direct avec des activités documentaires : cadastre, application juridiques ciblées, gestion de droits industriels ou de droits artistiques. Pour ce qui est des applications documentaires (cadastre, applications juridiques et d’informations commerciales ou industrielles) ou épi-documentaires (droits d’auteurs, copyright) on peut constater que les qualités intrinsèques de la blockchain induisent une véritable mutation du mode de partage des documents, d’une gestion des métiers de la conservation, et possiblement réglemente pour les bibliothèques leur logique collégiale et surtout territoriale et leurs modalités d’accès. C’est une façon de garantir l’intégrité, la validité juridique de la documentation dans des domaines pointus que des humains ou des automates trouvent où il faut et quand il faut. C’est une manière innovante de concevoir collectivement des modalités d’habiter les espaces documentaires et d’accès aux informations pertinentes.